Un rêve devenu réalité

Parcourir l’Europe en van, c’est déjà une jolie gageure. Mais quand on se lance dans cette
aventure avec une EB, le défi prend une tout autre dimension…

Eh bien, Pauline l’a relevé !
Elle est en ce moment… quelque part sur les routes. Elle pense à nous et nous écrit…

Salut les Debratiens !


Moi, c’est Pauline, j’ai 26 ans et comme la plupart d’entre vous, je suis atteinte d’une
épidermolyse bulleuse. Bon… la forme reste à déterminer. Initialement, les docs m’avaient
diagnostiqué une forme dystrophique. Quand j’ai revu récemment la docteur Bourrat, elle
m’a dit qu’il fallait attendre le résultat de la génétique pour savoir avec certitude si elle était
dominante ou récessive. J’attends donc le résultat du laboratoire de génétique pour une
définition précise.


Toujours est-il que je reste la seule de ma famille à avoir cette peau papillon.
« Une néomutation », m’a-t-on toujours dit. La gamine que j’étais retenait seulement
« mutation », comme pour les supers héros ! Souvent, ça m’amusait de me voir comme cela,
« une mutante », « une extraterrestre ». La seule de ma famille ! Enfin, parfois ça attisait
aussi ma colère et un sentiment d’injustice.


Pour vous faire un portrait, je suis « un peu » marquée aux pieds, mains, genoux, coudes,
cuir chevelu et dans la bouche. En gros, visuellement, ma maladie passe souvent inaperçue.
Donc une mutante, mais avec la réaction des gens à retardement, une fois qu’ils m’ont bien
observée.


Cette ambivalence de « mutante mais pas trop » m’a joué pas mal de tours durant mon
enfance. Je pouvais sembler « normale » visuellement, mais, en réalité, je ne pouvais pas
toujours suivre le rythme des autres enfants. Je ne vous fais pas de dessin, vous imaginerez
bien une enfant qui veut TOUT faire comme ses copains… sans réellement le pouvoir. Et qui
est souvent agacée par l’adulte dans l’ombre prêt à bondir avec une trousse à pharmacie.
Du coup ? Dans le dos des adultes, je faisais tout ce qu’ils craignaient et ça m’amusait !
Jusqu’à la chute… Faut dire que j’ai un peu fait tourner en bourrique tous les adultes autour
de moi, avec mes grandes plaies ouvertes qui ne m’arrêtaient pas pour autant !


Je me souviendrai toujours de ma première visite à Debra (EBAE à l’époque). Je devais
avoir 11 ou 12 ans. Oula ! Oula ! La pré-ado que j’étais, cherchant les limites de sa peau,
n’était pas prête à se prendre une si grande claque ! Je ne m’étais absolument jamais
confrontée à d’autres personnes ayant la même maladie que moi. Et je ne comprenais
absolument pas ce que je voyais. Plein de questions se bousculaient dans ma micro-tête.
« Mais c’est sûr et certain que j’ai pareil, moi ? Pourquoi ont-ils des bandages partout, eux ?
Il y a des personnes qui peuvent carrément être en fauteuil avec ce truc que j’ai ? Mais si je
ne leur ressemble pas et que je ne suis pas non plus comme mes potes de l’école, je suis
comme qui ? ».


Bref, les pensées assez logiques d’une ado en devenir, qui avait l’impression de débarquer
sur une nouvelle planète et qui ne trouvait pas trop sa place. Ces rencontres m’ont tout de
même un peu bouleversée. Je ressentais une profonde injustice pour eux et me disais que je
n’avais pas le droit de me plaindre d’avoir mal parfois.


Plus tard, avec plus de maturité et surtout de belles rencontres au sein de l’asso, j’ai
compris. J’ai compris que ces jeunes avec qui je discutais vivaient avec cette maladie, eux
aussi, tout comme moi ; que nous étions en fait tous différents malgré la même « mutation ».
J’ai découvert des personnes gentilles qui souffraient, certes, mais à leur échelle, tout
comme moi. Ils vivaient simplement leur vie, avec ce qu’ils avaient toujours connu.

Bon, je crois qu’avec ça vous avez un bon aperçu de ma relation à l’asso et de la casse-pied
que j’étais gamine. Allez, parlons du vrai pourquoi de cet article.
Me voici depuis plus de 8 mois dans un van que j’ai entièrement aménagé malgré cette peau
fragile. Avec de l’aide, bien sûr (merci encore à mon compagnon et ma famille). Aujourd’hui,
j’ai traversé 11 pays différents sur environ 23 000 km ! J’ai été sous la neige et j’ai skié. J’ai
fait des randonnées de 4 à 20 km, sous différentes températures avec différentes météos.
J’ai travaillé en ferme et avec des animaux. J’ai marché des journées entières pour découvrir
des villages et villes d’Europe. J’ai testé le VTT électrique en montagne. Je me suis même
baignée dans l’eau glacée au-dessus du cercle polaire. J’ai lancé des feux sous les aurores
boréales. Et ceci, avec cette mutation.


Décider de partir en van à travers l’Europe, à durée indéterminée, était pourtant un rêve que
certains professionnels de santé trouvaient irréaliste et utopique. Vivre avec cette maladie
dans un van représentait un trop grand challenge, d’après eux. Certains ont tenté de m’en
dissuader, j’ai même pensé à annuler ce projet. Leur avis m’avait effrayée. J’ai fait la chasse
aux informations pour trouver une assurance pouvant accepter de m’assurer avec cette
maladie. J’ai connu le casse-tête technique et logistique pour qu’on me fournisse
beaucoup de pansements et mon traitement de l’époque. Alors, j’ai douté.


Puis, ma famille et mon compagnon m’ont encouragée et m’ont soumis l’idée de trouver du
soutien auprès de Debra. L’asso a eu la gentillesse de me diriger vers le docteur
Emmanuelle Bourrat, spécialiste de notre maladie à Paris, que je n’avais pas revue depuis
de nombreuses années et de nombreux médecins. Et vous savez quoi ? Elle m’a
encouragée et m’a apporté des solutions ! Où était donc passé mon tempérament ? Au cas
où vous ne l’auriez pas compris, je suis une personne un peu têtue. Je n’avais pas le droit de
le faire ? Certains pensaient cela « irresponsable » ? Eh bien, fonçons alors ! Je vais leur
montrer que je ne suis pas de leur avis en vivant à fond cette aventure !
Et j’ai eu raison car Ragnar, notre van, pour moi c’est comme une bulle sécurisante qui me
permet de me soigner où que je sois et en toute intimité. Une grande trousse à pharmacie
qui me suit comme le faisaient les adultes autrefois, mais avec quand même pas mal
d’avantages supplémentaires !


Et en quoi ça concerne Debra et vous ? Bonne question !
Je me suis juste donné la petite mission personnelle de faire voyager à distance ceux qui le
voudraient. De peut-être faire émerger des envies, des idées chez vous. Et, à ma petite
échelle, faire connaître cette maladie rare aux quelques personnes que je croiserai sur ma
route. Par exemple, quand je pars en randonnée, je suis toujours vêtue du t-shirt de l’asso
ou munie de la banderole.


Des projets ? Il y en a plein, à perte de vue… certainement trop ! Mais si vous avez des
idées supplémentaires, je suis toujours partante ! N’hésitez pas et soyez acteurs à distance
de ce beau voyage ! Ce voyage est une façon aussi de prouver que c’est possible, avec
détermination et préparation.


Alors, êtes-vous prêts à embarquer dans notre van, Ragnar, pour la suite de ce tour
d’Europe ? Merci d’avoir eu le courage de me lire jusqu’au bout en tout cas. Et maintenant,
je vous dis : Allez, Kenavo sur les routes d’Europe !


Pauline (Instagram : @_Ragnaroad)

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